Deuxième étape : 23h - 4h00
Après la pause j’ai entraîné notre nouvelle équipe avec Danilo et Pascal, après un plein d’essence à Vernante,
dans l’aventure de la deuxième étape en commençant …par une erreur de navigation :
le groupe qui nous précédait est parti bille en tête avec une telle assurance que je les ai suivi aveuglément
dans un premier temps avant de me rendre compte dans un moment de clairvoyance et
les quelques secondes où le gps était allumé (à peine partis le voilà qui me faisait déjà des misères !)
qu’on s’écartait de la trace qui partait vers l’ouest.
On a laissé partir les autres et hop demi-tour vers le point de départ pour retrouver la trace bleue
qui nous a emmenés vers des pistes larges et roulantes de la Valle di Roaschia, en fait une route en construction.
Mimi et Nicolas verront en partant de Vernante le groupe de furieux quelques km plus loin s’arrêter
au bord de la route pour consulter leur gps…
L’importance de la navigation s’est encore une fois imposée à nous quand dans une forêt dense
on a d’abord dépassé un groupe de deux motos et un quad (que je ne me souvenais pas avoir vu au départ)
avant de se retrouver tous ensemble à chercher la bonne trace.
Chacun avait sa méthode mais – avec l’arrivée d’un autre groupe de trois motos – on avait l’impression
que personne ne sortirait de ce bois cette nuit-là.
Danilo, l’enfant du pays, ne connaissait pas ce coin et plutôt que de remplir mon écran de gps
avec toutes les traces rouges qui correspondaient à nos trajets enregistrés en plus des bleues du trajet du HAT,
j’ai préféré me poser un peu et étudier les courbes de niveau que j’avais vues sur la carte.
On est reparti en croisant des gars qui nous criaient « ce n’est pas par là, n’y allez pas, on en revient ! »
mais j'étais certain que l’issue se trouvait dans un petit sentier qui partait sur la droite à une centaine de mètres.
Arrivés en bas, contents, on s’est octroyé une petite pause et on entendait au loin les motos continuer à
tourner dans la colline…
Après ce passage délicat aussi bien en navigation, qu’en pilotage
(chemins étroits et glissants, des feuilles sèches, des racines) ou physiquement
(Pascal qui ramasse encore une fois mon Bifaro aux jambes trop longues pour moi resté coincé sur un rocher…)
la route vers Demonte a été une détente bien méritée.
La montée vers le Colle d’Ancoccia est un régal de virolos de plus en plus étroits et le paysage de montagne
qui se découpe dans le ciel clair de cette nuit de pleine lune est époustouflant de beauté.
On était déjà passé par cette route cet été avec Mimi et des amis de MTP (Oligo et Michel)
et que ce soit pour cette partie ou pour toute la fin de la deuxième étape, la navigation
ne nous posera plus de problèmes, Danilo et ma mémoire des cartes se substituant au gps
de toute façon défaillant
Le spectacle du plateau de la Gardetta reste pour moi le plus beau souvenir de ce Hard Alpi Tour :
un paysage fait de roches et d’éboulis, des montagnes à perte de vue, le tout noyé dans une lueur brumeuse,
irréelle, et quelques motos là-dedans, quelques feux rouges à l’horizon, un rêve lunaire et un état second
(le red-bull/café/coca sûrement).
Entre deux séances de photos, on volait littéralement avec nos bécanes au dessus des pierres
et on dépassait les autres groupes (je me suis quand même fait plaisir en suivant un gars en KTM 950
super enduro

), plus timorés ou moins inconscients
Avant la descente depuis le Sampeyre, on s’est quand même arrêtés,
pas pour le tableau extraordinaire de l’ensemble de la chaîne de montagne baignée dans une mer de brume
mais pour dépanner notre camarade Danilo qui n’avait plus de lookheed dans son bocal d’embrayage !
La route jusqu’à Brossasco – lieu de la deuxième halte – était en descente et je m’imaginais
que Danilo pourrait la faire en seconde, à petite allure sans changer de vitesse.
Arrivés là on verrait pour la suite. Au pire on pourrait peut-être le dépanner avec de l’huile moteur
que Pascal emportait avec lui, les problèmes de fuite d’huile de son 900 n’ayant pas été réglés avant son départ
il a fait le HAT avec un pansement de colle sur son moteur qui malgré tout fuyait allégrement…
Mais encore une fois Pascal le magicien nous a épatés en sortant de sa besace un flacon de liquide de frein
et d’embrayage et c’est quand même vachement soulagés qu’on a chassé les bulles du circuit d’embrayage de Danilo
qui n’en revenait pas de l’organisation de la French Team – enfin de Pascal en l’occurrence !
Cette piste (faite aussi cet été avec Mimi, Oligo et Michel mais avec les motos chargées) c’est le terrain de jeu idéal
pour casser un dos ou une partie cycle, Il n’y a pas une trace sans secousse, pas une ligne idéale
qui ne soit parsemée de pavés et de rochers, pas un instant de répit
Revenus sur la route après un arrêt à quelques kilomètres de la deuxième pause le Bifaro ne démarre plus !
Focalisé que j’étais sur mes problèmes de gps je n’avais pas vu mon voltmètre qui m’indiquait
un faible niveau de charge de la batterie et tourner toute la nuit sans éteindre une seule fois
– même à l’arrêt ou au redémarrage les pleins phares et mes feux à leds n’a pas dû arranger les choses…
Et Pascal m’a poussé… Et quand j’ai calé encore une fois Pascal m’a poussé encore une fois
et on a roulé finalement tous les trois en file indienne (moi sans phares) pendant 7-8 km jusqu’à Brossasco.
Pour la troisième étape je me suis promis (peut-être que les micro-coupures de courant étaient à l’origine
de la défaillance du gps ?) de laisser tomber l’alimentation externe de mon gps et de ne le faire fonctionner
que sur batteries.
Arrivés à Brossasco déjà sérieusement fatigués on a retrouvé des gars qui ronflaient dans tous les coins...
et Francesco qui avait sauté la deuxième étape parce qu’il n’y voyait rien la nuit, nous a expliqué que la troisième étape serait la plus dure physiquement et la plus délicate en matière de navigation
On a mangé un bout, bu un coup et pendant que je préparais mon gps, Danilo est resté figé sans dormir
et sans parler
Pascal s’est endormi du sommeil du juste pour une petite sieste d'une heure sur le gazon artificiel de l’endroit.
“Qu’est-ce-que la vie ? Un délire ? une illusion, une ombre, une fiction ; et le plus grand bien est peu de chose, car toute la vie est un songe et les songes sont des songes...”
Pedro Calderón de la Barca